Dons et défiscalisation : comment ça marche ?
Lorsque vous faites un don à un proche ou que vous versez une cotisation à un organisme d’intérêt général ou une association (sportive, culturelle, artistique, humanitaire, scientifique, etc.) par générosité, vous pouvez bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu. Son montant dépend en grande partie de la somme en jeu. Comment fonctionne la défiscalisation des donations en France pour les particuliers et pour les entreprises ? Peut-on faire un don sans justificatif aux impôts ? Réponses.
Faut-il déclarer un don d’argent à un proche?
Étrennes, anniversaires, récompenses suite à la réussite d’un examen : le don d’argent aux enfants et aux petits-enfants doit-il être déclaré au fisc, et, accessoirement, ouvre-t-il des droits en termes de réduction d’impôt ? Lorsque le don est considéré comme un présent d’usage, c’est-à-dire un don manuel non soumis aux droits de donation, il ne requiert aucune déclaration d’existence auprès de l’administration fiscale.
Toutefois, le Code civil est plus ambigu : sa valeur s’apprécie à la date où le don est fait, mais surtout selon la fortune du donateur. De fait, la situation varie selon les contribuables : un don de 10 000 euros de la part d’un donateur au patrimoine modeste n’est pas considéré comme un présent d’usage, contrairement à un don d’une valeur identique venant d’un donateur au patrimoine important.
Concrètement, on peut convenir qu’un présent d’usage, donc sans déclaration au fisc, ne peut dépasser 1 % du patrimoine du donateur. En revanche, des dons trop importants ou les versements d’un donateur régulier peuvent être requalifiés en donation suite à un contrôle fiscal. Il faut les déclarer au centre des impôts le mois suivant le don, en remplissant le formulaire 2735 « Déclaration de dons manuels et de sommes d’argent ».
Cela ne veut pas dire que le don numéraire (espèces, chèques, etc.) est imposable. Ainsi, dans le cadre de dons familiaux aux descendants, une exonération de 31 865 euros est appliquée pour une période de 15 ans. Autrement dit : un ascendant, à condition qu’il soit âgé de moins de 80 ans, peut donner jusqu’à 31 865 euros sur 15 ans à un descendant majeur émancipé.
À l’exonération de la donation numéraire s’ajoutent des abattements de droits de donation personnels, calculés selon le lien de parenté :
- 80 724 euros pour l’époux ou partenaire de Pacs ;
- 100 000 euros par enfant ;
- 31 865 euros par petite-fille ou petit-fils ;
- 5 310 euros par arrière-petite-fille ou arrière-petit-fils ;
- 15 932 euros pour chaque frère ou sœur ;
- 7 967 euros pour un neveu ou une nièce.
Quels sont les dons aux associations concernés par la défiscalisation ?
La défiscalisation concerne les dons à titre gratuit aux associations qui prennent la forme d’un versement d’une somme d’argent ou de cotisations, de dons en nature (objet de collection, œuvre d’art, actions, obligations, etc.), de frais provenant d’une activité bénévole, ou encore de l’abandon de produits et de revenus.
Cas du don par SMS : le donateur envoie via son smartphone la somme qu’il souhaite donner à l’association sélectionnée. L’argent est prélevé sur sa facture téléphonique, l’opérateur télécom se chargeant de reverser la somme à l’association. Les dons par SMS sont limités à 50 euros et à 300 euros par mois. Une donation supérieure à 5 euros déclenche obligatoirement un SMS de confirmation au donateur.
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La condition préalable pour accéder à une réduction d’impôt est de ne rien obtenir en retour. Autrement dit : il n’est pas possible de récupérer un avantage quelconque suite à la donation. En revanche, dans le cadre du versement de cotisations à une association, les avantages symboliques ou institutionnels, comme le droit de vote à l’assemblée générale, ne constituent pas, aux yeux du fisc, des contreparties. Si le donateur perçoit en échange des biens de faible valeur, il ne faut pas qu’elle dépasse un quart du montant du don.
Exemple : si vous remettez une cotisation d’une valeur de 400 euros, la valeur des biens recueillis ne peut pas être supérieure à 100 euros.
À quels associations ou organismes institutionnels puis-je faire un don ?
Pour que le don soit validé en vue d’une réduction d’impôt, l’organisme récepteur doit être à but non lucratif, avoir un fonctionnement large et non limité autour de quelques personnes, et posséder à la fois un objet social et une gestion désintéressée.
On peut mentionner les organismes suivants :
- Associations ou fondations reconnues d'utilité publique ;
- Fondation du patrimoine ou autres fondations ou associations agréées, en vue de la restauration de monuments historiques privés ;
- Associations cultuelles ou de bienfaisance autorisées à recevoir des dons et legs ;
- Œuvres ou organismes d'intérêt général présentant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ;
- Fonds de dotation, fondations universitaires ou partenariales ;
- Établissements agréés d'enseignement supérieur ou artistique ;
- Œuvres ou organismes d'intérêt général participant à la valorisation du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
- Mandataire financier ou association de financement électoral au profit d'un parti ou groupement politique et d'un ou plusieurs candidats ;
- Etc.
Pour une meilleure lisibilité auprès du public, une centaine d’organisations adhèrent à la Charte du Don en Confiance, qui s’appuie sur quatre grands principes : “transparence”, “recherche d’efficacité”, “respect du donateur”, et “probité et désintéressement”. Parallèlement, le syndicat associatif France Générosités propose un guide pour la philanthropie depuis le 11 juin 2019, afin d’informer et d’accompagner les Français dans l’élaboration d’un projet philanthropique.
Liens vers l’étude (pdf) : http://www.francegenerosites.org/wp-content/uploads/2018/11/Etude-Daniel-Bruneau-Nov-2018.pdf
Quel est le montant de la réduction d’impôt pour les dons aux associations ?
Si le don se fait au profit d’un organisme d’intérêt général ou reconnu d’utilité publique, le montant de la réduction d’impôt s’élève à 66 % du montant du don, dans la limite de 20 % du revenu imposable.
Exemple: un don de 100 euros ouvre droit à une réduction fiscale de 66 euros.
Si le don se fait au profit d’un organisme d’aide aux personnes en difficulté, le montant de la réduction d’impôt s’élève à 75 % du montant du don, dans la limite de 537 euros (seuil établi pour 2018). La fraction supérieure permet de bénéficier d’une réduction d’impôt de 66 %, dans la limite de 20 % du revenu imposable.
Exemple : un don de 1 000 euros ouvre droit à une réduction fiscale de 708,33 euros.
Calcul : (537 x 0,75) + (1000 - 537) x 0,66 = 402,75 + 305,58 = 708,33
Que se passe-t-il si la valeur des dons franchit le seuil de 20 % du revenu imposable ? Vous bénéficiez d’un report de l’excédent sur les cinq années suivantes, période durant laquelle vous avez droit à la réduction d’impôt aux conditions initiales identiques (sauf cas particuliers).
Et si je donne à nouveau les années suivantes ? Les nouveaux versements passent après les excédents des années précédentes qui sont prioritaires.
Zoom sur les régions les plus généreuses en France
Rapport du sondage : http://www.odoxa.fr/wp-content/uploads/2018/06/Odoxa-pour-Leetchi-Generosite-des-Francais.pdf
Comment déclarer mes dons aux associations à des fins de défiscalisation ?
Le donateur doit indiquer sur sa déclaration annuelle de revenu le montant versé. Quelle est la case où noter mes dons ?
- Case 7UF de la déclaration n° 2042 - RICI pour des dons aux organismes d’intérêt général ou reconnus d’utilité publique ;
- Case 7UD de la déclaration n° 2042 - RICI pour des dons aux organismes d’aide aux personnes en difficulté ;
- Case 7UH de la déclaration n° 2042 - RICI pour des dons à un ou plusieurs partis politiques.
Faire un don sans justificatif aux impôts est-il possible ? Oui, depuis 2013, le fisc n’oblige plus les donateurs à justifier leurs dons en joignant un reçu fiscal à la déclaration. Auparavant, il fallait en effet un justificatif des dons remis par l’organisme bénéficiaire. Toutefois, mieux vaut en conserver un durant les trois années suivantes en cas de contrôle fiscal.
La mise en place du prélèvement à la source à compter du 1er janvier 2019 n’entrave en rien le mécanisme de défiscalisation des dons aux associations réalisés en 2018. Le gouvernement a mis en place un système de versement d’un acompte au milieu du mois de janvier 2019. Le montant de ce premier acompte équivaut à 60 % de la réduction d’impôt à laquelle le donateur a droit suite aux dons de 2017. Le solde est rétribué à partir du mois de juillet 2019, une fois l’envoi de la déclaration de revenus qui renseigne sur le montant des dons aux associations 2018.
À savoir : les dons pour Notre-Dame de Paris (financement des travaux de restauration et de conservation) sont associés à une réduction d’impôt exceptionnelle portée de 66 % à 75 %, dans la limite de 1 000 euros, selon le projet de loi consacré à la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris approuvé par l’Assemblée nationale le 3 juillet 2019.
Article complémentaire : Infographie: Les principaux outils de défiscalisation
Comment calculer la valeur d’un don en nature ?
Si la valeur d’un don sonnant et trébuchant est facile à calculer, elle est beaucoup moins évidente dans le cas d’un don en nature. Pour estimer une prestation de service offerte par exemple par une entreprise, la valeur du don en nature correspond aux coûts supportés afin de réaliser la prestation. Si le don en nature consiste à mettre à disposition un salarié gratuitement, le calcul du don en nature coïncide au coût salarial (salaire et charges).
Le don en nature peut prendre la forme du prêt d’un local uniquement s’il y a un contrat de location entre les deux parties. La valeur correspond alors au montant du loyer si le propriétaire du lieu l’avait loué. Néanmoins, ce loyer auquel il renonce reste soumis à l’imposition des revenus fonciers.
Le don en nature d’un particulier peut aussi prendre la forme d’un don ou d’un apport de biens. Sa valeur correspond à celle du bien cédé gratuitement, soit le prix d’achat, soit le prix auquel il aurait pu être revendu dans le cas d’un bien d’occasion. Une entreprise peut également céder gratuitement un bien figurant dans un compte stock (biens amenés à être vendus ou consommés) ou d’un bien inscrit dans un compte d’immobilisation (biens durables : véhicules, outils, hangars, etc.).
Bon à savoir : le donateur doit toujours estimer la valeur du bien cédé gratuitement, et le bénéficiaire doit toujours veiller à ce que la valeur indiquée par le donateur coïncide avec celle de la valeur réelle de l’objet.
Mécénat et dons des entreprises : vers la fin d’une niche fiscale ?
Sous couvert de philanthropie, les dons des entreprises ouvrent des droits à la réduction d’impôt (impôt sur les sociétés-IS ou impôt sur le revenu-IR) à hauteur de 60 % de la valeur du don, dans la limite de 0,005 % du chiffre d’affaires annuel. La loi Aillagon sur le mécénat de 2003 avait permis de doubler ces avantages fiscaux, tout en rendant accessible ce type d’actions à tous les dirigeants associatifs et chefs d’entreprise, sans condition de chiffre d’affaires ou de valeur de don. Ainsi, les entreprises mécènes et les fondations ont délivré 3,5 milliards d’euros de dons en 2017.
Synthèse de l’étude : https://www.fondationdefrance.org/sites/default/files/atoms/files/fr_3_volets_page-simple.pdf
- Fonds de dotation :
Selon l’extrait de l'article 140 de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 : "Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif qui reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable et utilise les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une œuvre ou d'une mission d'intérêt général ou les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif dans l'accomplissement de ses œuvres et de ses missions d'intérêt général."
- Fondation abritée :
Selon l’extrait de l'article 20 de la Loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, modifié par loi n°2009-526 du 12 mai 2009 - art. 122 : "Peut [...] être dénommée fondation l'affectation irrévocable, en vue de la réalisation d'une œuvre d'intérêt général et à but non lucratif, de biens, droits ou ressources à une fondation reconnue d'utilité publique (« fondation abritante ») dont les statuts ont été approuvés à ce titre, dès lors que ces biens, droits ou ressources sont gérés directement par la fondation affectataire, et sans que soit créée à cette fin une personne morale distincte."
Le gouvernement menace de raboter cette niche fiscale pour faire des économies. Les pistes étudiées sont diverses : réduction des contreparties à hauteur de 25 % de la valeur du don, plafonnement de la défiscalisation en valeur absolue ou relative, distinction des réductions d’impôt selon que le bénéficiaire est privé ou public, etc. Cette crainte saisit aussi bien les entreprises que les associations comme La Croix-Rouge française, le Secours populaire, Les Restos du cœur et la Banque alimentaire qui s’alarment d’une contraction importante des dons. La réforme de la loi sur le mécénat est au menu du projet de loi de finances pour 2020.
Bon à savoir: sponsoriser un événement n’est pas compatible avec la donation, car il s’agit d’une action de publicité pour l’entreprise, ce qui entérine donc une contrepartie.
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